Tout comme les juges européens ont réussi des coups d’État en affirmant la suprématie de leurs décisions sur les droits nationaux, alors que, selon les traités, l’Union européenne n’est pas un État fédéral, la BCE s’est lancée, avec Draghi et Lagarde, dans une fuite en avant – en fait un véritable coup d’État monétaire qui ne correspond pas aux traités et aux statuts de la BCE -, en émettant de la monnaie de singe tous azimuts, non garantie par un actif tangible. Cela équivaut à mutualiser la dette des États par les voies détournées de la BCE

La BCE a bafoué ouvertement les deux clés de répartition des émissions d’un État, puisqu’elle ne peut racheter plus de 33 % des titres d’une émission et se doit de plafonner son encours des titres rachetés à un État au pourcentage de la participation de l’État dans le capital de la BCE, comme le rappelle Le Point. Le rachat « non proportionné » des dettes italiennes (et d’autres États) n’est rien d’autre qu’un sauvetage de l’Italie par la BCE puisque les obligations italiennes totaliseraient, selon Goldman Sachs, 35 à 45 % du total racheté actuellement par la BCE.

Il y a donc clairement infraction à l’article 123 du traité de l’Union européenne qui interdit le financement des États par la BCE. Les énormes volumes d’achat ne peuvent plus être considérés comme relevant de la politique monétaire. Et malgré cela, l’écart de taux italien avec celui du Bund allemand n’est pas stabilisé. De plus, la boîte de Pandore des taux négatifs ouverte en 2014 a pour effet que la Deutsche Bank commence à pratiquer les taux négatifs pour les dépôts de ses clients au-dessus de 100.000 euros, avant de le pratiquer demain pour la plupart de ses clients. Acheteur et prêteur de la dernière chance, la BCE n’offre en fait qu’un répit, tout en prolongeant l’agonie des États hyper-endettés.

La Cour constitutionnelle de Karlsruhe a estimé, le 5 mai, que certaines mesures prises par la Bundesbank dans le cadre du programme PSPP de la BCE, soit 2.700 milliards d’euros depuis 2015, étaient inconstitutionnelles. La Cour a fixé un ultimatum à la BCE, en affirmant que la Bundesbank devra cesser d’acheter, d’ici trois mois, des emprunts d’État de la zone euro pour le compte de la BCE, si cette dernière ne prouve pas que ces achats sont justifiés. Sinon, elle ordonnera à la « Buba » de se retirer et de vendre les 534 milliards d’euros d’obligations détenues au nom de la BCE (Le Figaro). Il y a risque pour les finances publiques allemandes, pour la rémunération de l’épargne, et de maintenir en activité des entreprises non viables. Le programme PEPP n’est pas concerné par ces menaces de restriction et l’infraction très claire à l’article 123 n’a pas été retenue pour l’instant par la Cour, afin de ne pas faire exploser immédiatement la marmite !

« Pour la première fois de l’Histoire, la Cour constitutionnelle a jugé que les actions et les décisions d’entités européennes ont été au-delà de leurs compétences légitimes et qu’elles n’ont donc pas de validité en Allemagne », a déclaré le président de la Cour, Andreas Voßkhule. Dans un passage virulent, la Cour rappelle aux juges européens qu’ils sont les garants des traités et non l’inverse. Les magistrats ont utilisé le terme latin ultra vires, qui signifie « hors de ses compétences ».

Giuseppe Conte, en bon politicien, est monté au créneau car l’illusion d’un accès illimité aux fonds de la BCE pour renflouer l’Italie disparaît, mais il aurait mieux fait de se taire, selon l’éthique des traités. Selon Challenges, un recul du PIB italien de 9,5 % est prévu pour 2020, avec une dette publique de 158,9 %.

La Cour européenne est aussi montée au créneau en prétendant que si sa suprématie est contestée, il n’y a plus d’Union, alors qu’il y aurait une autre Union qui serait une Confédération, ce qui correspond à l’aspiration des peuples. La France, trahie par ses dirigeants, en accordant la primauté aux juges européens, pour construire l’Europe fédérale, va se retrouver un de ces jours aussi le dindon de la farce. Il semble que c’est Jens Weidmann, le président de la « Buba », qui tire les ficelles : un coup de canon de semonce vient d’être tiré par l’Allemagne en guise d’avertissement ! Lagarde ne fait pas le poids !

Tout cela va se terminer par la banqueroute de l’Italie, puis de la France, avec retour à la monnaie commune et une première dévaluation du franc de 25 %, fin 2020 ou début 2021 au plus tard, à moins que les traités ne soient renégociés ? Thierry Breton remarque, en effet, que « sans le marché unique, les industries allemandes et néerlandaises sont condamnées ».